Analyse discursive du fonctionnement de l’espace dans L’enfant noir de Camara Laye et Les Soleils des indépendances d’Ahmadou Kourouma
DOI:
https://doi.org/10.19044/esj.2025.v21n23p96Keywords:
Espace, espérance, discours, idéalisation, pessimisme, colonisationAbstract
Cette contribution explore la représentation de l’espace romanesque sous trois axes : l’espace mimétique, la toposémie fonctionnelle et le symbolisme idéologique dans L’enfant noir de Camara Laye et Les Soleils des indépendances d’Ahmadou Kourouma. Une lecture critique démontre que l’espace des deux textes est construit pour interroger les fondements de la culture, de l’identité et de l’historique dans la réalité précoloniale et postcoloniale de l’Afrique. Inscrit dans la littérature nationaliste, Camara Laye vante les valeurs de l’Afrique traditionnelle comme un moyen de diaboliser et de déconstruire la colonisation, traduisant ainsi l’espace romanesque à un outil de résistance coloniale. Les lieux idylliques représentés dans L’enfant noir symbolisent une Afrique ancestrale, harmonieuse, libre, prospère et en sécurité, incarnant une utopie mémorielle. En revanche, l’espace répugnant dans Les soleils des indépendances fustige la colonisation, ainsi que les institutions, les structures sociopolitiques et religieuses, surtout de l’Afrique postcoloniale à travers son espace dystopique. Nourri de pessimisme, cet espace semble dépeindre l’état actuel d’une Afrique en crise, ravagée par l’absurdité de la colonisation et les injustices. Kourouma établit un parallèle entre ses personnages et son espace. Les constituants dialectiques des lieux représentés reflètent le déséquilibre psychologique, moral, économique des personnages et un effondrement des structures sociales, politiques et religieuses de l’Afrique post-indépendance. Bien que les deux textes dépeignent respectivement des espaces contrastés d’un passé idéalisé et d’une crise postcoloniale, leur représentation spatiale prône une Afrique unie, prospère et régénérée.
This study examines the representation of novelistic space along three axes: mimetic space, functional toposemy, and ideological symbolism in Camara Laye’s The Dark Child and Ahmadou Kourouma’s The Suns of Independence. A critical reading shows that the space in both texts is constructed to question the foundations of culture, identity, and history within Africa's precolonial and postcolonial realities. Within nationalist literature, Camara Laye praises the values of traditional Africa as a way to critique and dismantle colonization, turning novelistic space into a tool of colonial resistance. The idyllic places in The Dark Child symbolize a peaceful, free, prosperous, and secure ancestral Africa, representing a memorial utopia. In contrast, the disturbing space in The Suns of Independence criticizes colonization, along with the institutions, sociopolitical and religious structures mainly of postcolonial Africa, through its dystopian setting. Filled with pessimism, this space portrays Africa’s current crisis-ridden state, devastated by the absurdity of colonization and injustices. Kourouma draws a parallel between his characters and their space; the dialectical elements of these places reflect their psychological, moral, and economic struggles, as well as the collapse of the social, political, and religious structures of post-independence Africa. Despite presenting contrasting spaces of an idealized past and postcolonial crisis, respectively, both novels ultimately use spatial representation to promote a united, prosperous, and renewed Africa.